O’ SENSEI (terme honorifique traduit par « Maître »)
MORIHEI UESHIBA : Histoire d’une vie
14 Décembre 1883 : Naissance à TANABE dans la préfecture de Wakayama du 4ème Enfant et du premier fils de Yoroku Ueshiba, fermier de classe moyenne et chef de village, marié à Yuki, faisant parti du clan Itokawa, bien connu dans la région.
Tanabe est située à quelques 320 kilomètres au sud d’Osaka. C’est un village niché au pied des montagnes de Kumano sur la côte de la province de Kii (actuelle préfecture de Wakayama). Kumano est la terre sainte du Japon. Les grands sanctuaires de Kumano et la cascade sacrée de Nashi sont au monde shintô ce que la Mecque est aux musulmans. Ainsi, tous les vrais croyants accomplissent inlassablement le pèlerinage vers ces lieux saints. Dès sa naissance, Morihei fut donc baigné dans une atmosphère de surnaturel, de mystère et de sacré.
1885 – 1890 : A l’âge de 7 ans, il entre à l’école du temple du village, apprend à lire et à écrire et reçoit les rudiments du confucianisme et du bouddhisme shingon. il est très impressionné par la vie de Kobo Daïshi, un prêtre fameux. De santé fragile, son père lui fait faire de la lutte et de la natation. Il entre ensuite à l’école primaire de Tanabe.
1897 – 1901 : Il entre au lycée de Tanabe puis le quitte pour s’inscrire dans une école de soroban (boulier japonais utilisé pour la comptabilité) et finit par travailler au bureau des impôts locaux.
1902 – 1903 : Il rencontre Kamagusu Minakata, un lettré excentrique fervent défenseur de l’environnement. Morihei prit part aux mouvements de protestation (organisé par Kamagusu) soulevés par la nouvelle réglementation sur la pêche et démissionne de son emploi. Il se rend à Tokyo pour monter une petite entreprise de fournitures scolaires, « Ueshiba &Co ». Il étudie le jujutsu de l’école Kito dirigé par Tozawa Tokusaburo et l ’escrime de l’école Shingake. Malheureusement, il contracte le béribéri, dissout son entreprise et retourne avec ses employés dans sa ville natale. Il s’y marie à une amie d’enfance, Hatsu Itokawa.
1903 – 1906 : Il s’engage dans l’armée pendant la guerre russo-japonaise. Surnommé « le Dieu des soldats », il est nommé sergent. Il pratique alors le jujutsu de l’école Nakaï.
1907 – 1909 : Il retourne dans sa ville natale et devient très actif dans les activités destinées aux jeunes de la région. Son père transforme un bâtiment en dojo de judo et y fait venir Kiyoichi Takagi (qui deviendra plus tard 9ème Dan). Il reste toujours très actif politiquement et étudie le jujutsu de l’école Gotoha Yagyu et reçoit son diplôme d’enseignant de l’école Nakaï.
1910 – 1911 : Suite aux appels gouvernementaux pour la colonisation de l’Hokkaïdo, il décide d’y émigrer.
1912 : Chef du groupe de pionniers Kishu (80 personnes), il s’installe au village deShirataki et entreprend le défrichage de cette région.
1913 – 1914 : Dans des conditions difficiles, plusieurs fermes se montent ainsi que les infrastructures du village. Il se fait appeler « le roi de Shirataki ».
1915 – 1916 : Il rencontre le très fameux maître Sokaku Takeda de l’école de jujutsu Daïto, qui lui enseigne en un peu plus d’un mois les rudiments de son art et lui délivre le diplôme de l ’école.
1917 – 1918 : Le village de Shirataki se développe avec bonheur puis est détruit par un gigantesque incendie le 23 mai 1923. Le fondateur travaille sans relâche à sa reconstruction.
1919 : Des nouvelles alarmantes sur la santé de son père mettent un terme à sa période pionnière. Sur la route qui le conduit au chevet de son père, il entend parler du révérend Deguchi Onisaburo de la religion Omoto et retarde son retour pour implorer la guérison de son père. Le message ambigu du maître Deguchi « Votre père est bien comme il est » lui apporte le réconfort.
1920 : Son père meurt le 2 janvier. Rongé par le remords, il s’installe à Ayabe avec sa famille et entame son initiation religieuse sous la direction du maître Deguchi. Pendant 8 ans, il suit l’enseignement du maître Deguchi et ouvre un dojo d’arts martiaux intitulé « Ecole Ueshiba » afin d’enseigner aux membres de la religion Omoto. Ses 2 premiers fils meurent des suites de maladie en août et septembre de cette même année.
1921 : Sa réputation de maître d’arts martiaux se répand au-delà des membres de la religion Omoto. Le révérend Deguchi est arrêté mais le dojo continue à fonctionner. Le 27 juin, naissance de son 3ème fils, Kisshomaru, moment de bonheur après une longue période d’événements malheureux.
1922 – 1923 : Le révérend Deguchi sort de prison. Le fondateur l’aide à reconstituer la religion Omoto. O senseï se plonge alors dans l’étude du Kototama. Son art est de plus en plus orienté vers le spirituel. Des techniques anciennes du jujutsu des écoles Daïto et Yagyu naît un nouvel art martial appelé « Aïki Bujutsu » mais qui va se populariser sous la dénomination « Ueshiba Ryu Aïki Jujutsu ».
1924 : Adhérent à la doctrine selon laquelle toutes les religions ont une même origine, le fondateur s’embarque avec le révérend Deguchi pour la Mandchourie et la Mongolie. L’équipée, en pleine guerre, finit presque tragiquement et le fondateur ne s’en tire que grâce à son intuition fantastique (« Il m’arriva de voir comme une petite balle de lumière blanche »). Le fondateur s’en retourne à son école d’art martial et s’intéresse aux techniques de sabre qu’il intègre dans son Aïki Jujutsu.
1925 : Après son retour, il semble fréquemment possédé par une force divine. Défié en combat singulier par un officier de marine, expert en Kendo, c’est par intuition qu’il devine chaque assaut de son adversaire. Cet événement concrétise ses recherches, à savoir : « la victoire sans combat ». C’est pour lui une seconde naissance. Ce qui va devenir plus tard l’Aïkido se centrera sur le principe d’unité avec l’univers. Le « Jutsu » (technique) disparaît pour laisser la place au « Dô » (voie). Sa renommée s’étend parmi les officiers de la marine impériale et même jusqu’à l’amiral Isamu Takeshita qui l’invite à Tokyo pour une démonstration. On lui demande de conduire un stage spécial de 21 jours au palais impérial d’Aoyama.
1926 : De nouveau, il est invité par l’Amiral Takeshita à Tokyo pour instruire les officiers, les fonctionnaires du palais impérial et quelques hommes d’affaire. Le fondateur voudrait s’installer à Tokyo, mais la maladie l’oblige à retourner à Ayabe.
1927 : Le fondateur décide de répondre à une nouvelle invitation de l’amiral Takeshita après que le révérend Deguchi ait insisté pour qu’il s’installe enfin de manière indépendante.
1929 : Il construit un dojo temporaire près du temple de sengakuji au sud de Tokyo. Des acteurs fameux, des artistes, des officiers de marine, y reçoivent les rudiments de son art. En 1830, commence la construction d’un dojo permanent dans le quartier d’Ushigome (site du présent dojo central). C’est à cette époque qu’il reçoit la visite de Jiguro Kano, le fondateur du judo moderne, qui aurait déclaré après une démonstration : « Voilà mon idéal du Budo ». Jiguro Kano délègue alors Jiro Takeda et Minoru Mochizuki pour un entraînement de longue durée.
1931 : Le dojo permanent « le Kobukan » est terminé en avril. MM. Kamata, Iwata, Funabashi entrent comme Uchi Deshi. C’est le premier âge d’or qui s’achèvera à la fin de la 2ème guerre mondiale. Le Kobukan est alors surnommé « le dojo de l’enfer ».
1932 : L’art martial du fondateur commence à essaimer dans tout le pays. De nombreux dojos se créent.
1935 – 1938 : Le fondateur devient une des figures les plus prestigieuses du monde du Budo. Le nouvel art martial se dénomme maintenant « Aïkibudo ».
1939 : Le fondateur se rend en Mandchourie pour des démonstrations publiques. Le directeur de l’éducation physique de Mandchourie, l’ancien lutteur de sumo, Tenryu, est si impressionné qu’il devient un de ses disciples.
1940 : Le premier directeur du Kobukan est l’amiral Takeshita. L’ Aïkibudo est enseigné dans les services de la police secrète de l’armée, la terrible Kempetaï.
1941 : La 2ème guerre mondiale commence pour le Japon. Les élèves s’en vont pour le front. Le jeune Kisshomaru, Kisaburo Osawa (ancien directeur technique de l’Aïkikaï) continue à faire fonctionner le dojo.
1942 : Morihei estInvité au 10ème anniversaire du « Manchuko » devant l’empereur. Tout le monde est très impressionné? Compte tenu de la mobilisation générale instaurée au Japon, le gouvernement décide de faire de l’Aïkibudo une organisation nationalisée. C’est le gouvernement qui délivre les diplômes d’instructeur et de professeurs. Le fondateur, lui, n’y voit que les aléas temporaires provoqués par la guerre et progresse dans ses propres recherches en installant un dojo indépendant à Iwama. O Senseï désigne son fils « Directeur » du dojo et se retire avec son épouse dans le département d’Ibaragi. Il en profite pour vivre son idéal, se partageant entre le fermage et le budo. Pendant ce temps, son fils, Kisshomaru, se bat pour maintenir les activités du dojo de Tokyo.
1946 – 1947 : Le fondateur demeure à Iwama où il enseigne aux jeunes du pays et s’occupe des travaux de la campagne. Le Kobukan de Tokyo sert de logis aux sans-abris. Il n’y plus entraînement hormis à Iwama. Le Budo et l’Aïkido sont officiellement en disgrâce et leur utilité sociale est même contestée. Le fondateur retiré à la campagne, veut ignorer ce fait et continue à perfectionner son art.
1948 : Le chaos engendré par l’après-guerre subsiste. Kisshomaru s’entretient avec des représentants du Kobukan sur l’opportunité de rétablir le siège de l’organisation à Tokyo et de faire revivre le Kobukan. Après bien des difficultés, le fondation AÏKIKAÏ naît mais le siège restera à Iwama jusqu’en 1953, sur les instructions du gouvernement.
1948 – 1955 : Après formation de l’Aïkikaï, le fils du fondateur s’emploie activement à développer la nouvelle organisation. De son côté O senseï poursuit sa vie semi-retirée mais entame à partir de 1950 une série de démonstrations et de conférences. Sur ses 70 ans, sa pratique est moins puissante mais illustre bien sa philosophie : AÏKIDÔ = HARMONIE.
1956 : Le 1er septembre, pendant 5 jours, démonstrations de l’Aïkikaï sur la terrasse du grand magasin de Tokyo, Takashimaya. Les diplomates et le public sont très impréssionnés.
1957 – 1960 : L’engouement pour l’Aïkido se poursuit et le fondateur laisse à son fils le soin de diriger l’Aïkikaï.
1961 : Sur l’invitation de l’Aïkikaï de Hawaï, le fondateur se end aux U.S.A pour lancer son message de paix et d’amour.
1967 : Construction du nouveau dojo de l’Aïkikaï.
1968 : Le 12 janvier, O Senseï donne sa dernière démonstration publique.
1969 : Bien que paraissant encore vigoureux, son état de santé se détériore.
Le 26 avril, O Senseï meurt paisiblement.
Le 14 juin, Kisshomaru Ueshiba est désigné officiellement comme nouveau chef de la fondation Aïkikaï.